Le développement de la recherche dans les Eparses

Le rattachement des îles Éparses à l’administration des TAAF en 2007 a été l’opportunité, pour la collectivité, d’y appliquer des principes de gestion d’ores et déjà suivis dans les Australes y compris en matière de recherche, outils indispensable pour accorder connaissance et préservation du territoire.

Les Iles Eparses, sanctuaires de biodiversité et… by TAAF

La collectivité des Taaf a pour priorité la mise en place d’outils de préservation et restauration de la biodiversité sur son territoire. L’un des principaux outils pour répondre à cette priorité est la Réserve Naturelle Nationale des Terres Australes établie par le décret n°2006-1211 du 3 octobre 2006 et modifié par le décret n°2016-1700 du 12 décembre 2016 portant extension et modification de la réglementation de la réserve naturelle. Les Taaf mènent, à ce titre, une réflexion visant à étendre ce statut à d’autres îles du territoire de la collectivité telles que les Glorieuses pour lesquelles le dossier de classement est en cours d’élaboration au second semestre 2019.

La mise en place de statuts de protection doit toutefois s’appuyer sur une connaissance fine des territoires concernés issue, en partie, de la recherche dans les îles Eparses. C’est pourquoi, au-delà de sa mission de conservation du patrimoine naturel, la collectivité des TAAF s’est engagée dans une stratégie de soutien et de maintien de la recherche sur l’ensemble de son territoire.

Contexte et enjeux de la recherche dans les îles Eparses

Depuis plus de 10 ans, il n’est plus à démontrer que la communauté scientifique internationale voit à travers les iles Eparses un espace privilégié de par son caractère originel. La pression anthropique y étant quasiment nulle, elles apparaissent comme un point de référence dans le sud de l’Océan Indien à mettre en regard de sites plus ou moins anthropisés tels que Mayotte. A noter qu’au-delà d’une simple application en milieu tropical, la recherche dans les îles Eparses permet d’envisager cette activité sur un gradient latitudinal qui s’étend, dans le canal du Mozambique, du 11ème parallèle sud (avec les îles Glorieuses) au 22ème parallèle sud (Europa). Cette amplitude géographique permet d’amplifier la portée et la pertinence des résultats par le nombre de points de comparaison à l’échelle  locale.

A noter que les travaux développés sur ces îles, au même titre que sur les autres territoires gérés par les TAAF, contribuent non seulement à la Recherche sur des thématiques au cœur de grands enjeux régionaux, comme la compréhension et la préservation des milieux marins et terrestres, l’évolution de la biodiversité mais aussi planétaires comme les effets des changements globaux (montée des eaux, érosion côtière, fréquence des évènements climatiques extrêmes, etc.). En ce sens les TAAF renforcent et prolongent ainsi jusqu’aux latitudes tropicales le réseau des sites de référence (dont la Terre Adélie et les Australes) qu’elles mettent à disposition de la communauté scientifique internationale.

Les programmes scientifiques mis en place et à venir permettent de plus à la France de répondre à des engagements régionaux et internationaux. A titre d’exemple, les travaux de Recherche menés sur les tortues marines permettent d’alimenter la base de données du Mémorandum d’Entente pour la Conservation et la Gestion des Tortues Marines et de leurs Habitats dans l’Océan Indien et dans le Sud Est de l’Asie (IOSEA). Ces travaux ont permis la rédaction du plan national d’action 2015-2020 en faveur de ces espèces marines (application de la « Loi Grenelle ») dans le respect des engagements de la France.

Le développement de la Recherche dans les îles Eparses

La recherche en milieux extrêmes et isolés, que sont les australes ou l’antarctique, a permis aux TAAF d’acquérir des décennies de compétences techniques et logistiques aisément transposables aux îles Eparses, qui plus est avec le soutien des FAZSOI. C’est donc dans la lignée des actions scientifiques existantes de longue date dans les Eparses, mais jusqu’à présent ponctuelles, que la collectivité s’est investie plus fermement dans le développement et la diversification de la recherche sur les îles Europa, Juan De Nova, Glorieuses et Tromelin ainsi que sur l’atoll Bassas Da India.

Dans cette perspective, des activités scientifiques sur les Îles Eparses sont engagées notamment à travers des programmes européens comme le Xe Fond Européen de Développement (FED) régional « Gestion durable du patrimoine naturel de Mayotte et des îles Eparses » qui laisse désormais place au XIe FED « Observatoire de la Biodiversité et du changement climatique ». Le programme BEST 2.0 permet, quant à lui, de développer la connaissance des milieux et les actions de préservation via des projets diversifiés traitant à la fois le milieu marin (suivi acoustique des fonds marins) et le milieu terrestre (suivis ornithologiques, maîtrises des plantes envahissantes et restauration des espèces endémiques).

Dans une perspective plus durable et en l’absence de compétences de l’Institut polaire Paul Emile Victor (IPEV) dans les îles Eparses, la collectivité des TAAF a souhaité soutenir la création d’un Consortium de recherche dédié à cette partie du territoire contribuant à l’avancée des connaissances scientifiques sur les thématiques au cœur des grands enjeux planétaires.

QU’EST-CE QUE LE «  CONSORTIUM DE RECHERCHE ÎLES ÉPARSES » ?

La communauté scientifique internationale considère que la situation géographique des îles Éparses et leur état de conservation exceptionnel, de par l’isolement géographique, le caractère insulaire et une occupation humaine historiquement très limitée de ces îles, offrent un support unique pour le développement de la recherche française et internationale. Elle qualifie même les îles Éparses de « sanctuaires océaniques de la nature primitive » disposant d’un patrimoine biologique terrestre et marin remarquable.

Les TAAF bénéficient de plusieurs décennies d’expérience dans le soutien aux activités de recherche en milieux isolés dans le cadre de la gestion de ses territoires austraux et polaire. Gestionnaires des îles Éparses depuis 2005, les TAAF se sont engagées à étendre leur rôle d’appui à la recherche dans ce cinquième district, situé en zone tropicale.

En l’absence de compétences de l’Institut polaire Paul Emile Victor (IPEV) dans les îles Éparses, il a été décidé de créer un Consortium (ou groupement) de recherche inter-organismes permettant de contribuer à l’avancement des connaissances scientifiques sur des thématiques au cœur de grands enjeux planétaires comme le changement climatique, l’évolution de la biodiversité ou encore l’impact de l’Homme sur son environnement. Certaines des connaissances acquises dans le cadre du Consortium de recherche servent directement à définir les politiques de conservation mises en œuvre par les TAAF sur ces territoires. La participation au Consortium est régie par la signature d’un accord-cadre, qui définit la contribution financière et technique apportée par les membres aux projets lauréats. L’animation de ce dispositif repose sur un comité de pilotage et un comité scientifique.

Le Consortium de recherche îles Éparses I (2011-2014)

Le premier Consortium, sous la coordination du CNRS-Inee et soutenu plus largement par le CNRS (Inee et Insu), les TAAF, l’Agence des aires marines protégées (AAMP, aujourd’hui intégrée à l’office français de la biodiversité – OFB), l’Institut de recherche pour le développement (IRD), en partenariat avec l’IPEV, le Museum national d’Histoire naturelle (MNHN) et l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer), a permis de financer 18 projets de recherche sur l’écologie des îles Éparses. Ceux-ci ont conduit à la production d’environ 70 publications scientifiques et contribué à l’amélioration des connaissances ainsi qu’à la mise en place d’une meilleure gestion et préservation de ces territoires.

Le Consortium de recherche îles Éparses II (2017-2021) 

Le deuxième Consortium, porté par le CNRS, l’IRD, l’Ifremer, l’Office Français de la Biodiversité (OFB), l’Université de La Réunion, le Centre Universitaire de Formation et de Recherche (CUFR) de Mayotte et les TAAF, a financé, sur la période 2017-2021, 14 projets répondant aux trois axes de recherche suivants:

  1. Les îles Éparses comme « observatoires » des effets des changements d’origine climatique.
  2. Les îles Éparses comme « laboratoires » de recherche sur la diversité biologique et le fonctionnement des écosystèmes faiblement anthropisés.
  3. Les îles Éparses et les écosystèmes marins voisins.

Les deux premiers Consortiums ont bénéficié d’un budget d’un peu plus d’un million d’euros au total. D’importants moyens logistiques ont été mobilisés au bénéfice des projets : deux rotations dédiées d’un mois du Marion Dufresne dans l’ensemble des îles (en 2011 et 2019), embarquements réguliers sur les moyens maritimes et aériens des Forces armées de la zone sud océan Indien (FAZSOI), et affrètement de navires privés.