Initié en 2019 avec le soutien financier de l’Office français de la biodiversité (OFB), le réaménagement de la Baie du Marin (district de Crozet) vise à réduire l’emprise des installations humaines et leurs impacts sur la colonie de manchot royal (24 000 couples), tout en améliorant l’intégration paysagère des infrastructures sur le site. Après 3 années de réalisation, les travaux se sont achevés en octobre 2023 et constituent un très bel exemple du défi relevé par les Terres australes et antarctiques françaises de concilier la préservation du patrimoine naturel (biodiversité et paysages) et les activités humaines (recherche scientifique et logistique).
La Baie du Marin, située en contre-bas de la base Alfred-Faure (Ile de la Possession, Archipel Crozet) accueille une colonie de manchot royal ainsi que des installations humaines nécessaires aux activités logistiques et de recherche scientifique du district. Compte-tenu de l’emprise importante des infrastructures sur le site, une première phase de travaux a été exécutée entre 2012 et 2014 et a permis de réduire de 38% la surface occupée par les installations humaines présentes sur le site. Il demeurait toutefois en Baie du Marin une forte emprise humaine qui fragmentait la colonie et constituait un frein à la bonne circulation des individus et à la recolonisation des espaces libérés. Enfin, les infrastructures continuaient d’impacter fortement la valeur paysagère du site.
Compte-tenu de la faune qu’elle abrite (colonie de manchot royal, colonie de manchot papou, éléphants de mer, etc.), la Baie du Marin présente d’importants enjeux écologiques et paysagers qui doivent être préservés. Particulièrement prisée par les personnes en mission lors des rotations du Marion Dufresne, elle représente une vitrine de la stratégie environnementale mise en œuvre par les Terres australes et antarctiques françaises, en accord avec le statut de réserve naturelle nationale (2006) et son inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO (2019).
C’est dans ce contexte qu’est née en 2019 la volonté d’engager une seconde phase de réaménagement de la Baie du Marin afin d’agir sur l’ensemble des « points noirs » identifiés, réduire l’impact des installations humaines et améliorer la naturalité du site. Avec le soutien financier de l’office français de la biodiversité (OFB), ce projet d’envergure vise plus particulièrement les objectifs suivants :
- Réduire l’artificialisation de la Baie du Marin en diminuant l’emprise au sol des infrastructures humaines et ainsi restituer de la surface utile à la colonie de manchot;
- Garantir une meilleure intégration paysagère des infrastructures par la suppression du béton, l’installation de barrières en bois et le bardage des bâtiments;
- Améliorer la circulation des manchots entre les différents secteurs de la colonie et favoriser la recolonisation des espaces libérés en créant des ouvertures et connexions;
- Améliorer l’écoulement des eaux de ruissellement;
- Réduire les rejets d’eaux usées dans le milieu naturel.
Engagée en 2019, la rédaction du plan technique des travaux a fait l’objet de concertations avec l’institut polaire français (IPEV) et la communauté scientifique afin de bénéficier de leur expertise, recueillir leurs avis et ajuster le projet en conséquence. Ces échanges ont également permis de définir la période de moindre sensibilité de la faune sauvage pour limiter le dérangement. Il a ainsi été décidé de ne réaliser les travaux qu’entre juin et octobre, en dehors des périodes de reproduction du manchot royal et de l’éléphant de mer. Toujours dans un souci de réduction des impacts sur la colonie de manchots, les ouvriers opérant sur le site ont été formés aux bonnes pratiques et ont été accompagnés par les agents de direction de l’environnement des TAAF et les manchologues. Enfin, un protocole d’observation du comportement de la faune sauvage a été appliqué sur le site afin de déceler rapidement toute perturbation des individus, en identifier l’intensité et l’origine, prendre les mesures correctives nécessaires, et aussi documenter les faits dans la perspective d’éventuels futurs travaux à proximité d’une colonie de manchots.
Les premiers travaux sur le site ont débuté en juin 2021 et se sont poursuivis sur trois périodes jusqu’en octobre 2023. Sans être exhaustif, les principaux travaux réalisés ont été :
- Le dévoiement des eaux pluviales par l’installation d’une buse passant sous la piste;
- Le retrait du contre-poids en béton de l’ancien téléphérique;
- Le bardage du local carrelé, du local Haute Tension et de la cabane Stahl;
- L’ouverture d’un passage pour la faune sauvage entre la plage et la zone centrale;
- La modification du tracé de la piste afin de réduire son emprise sur la colonie;
- Le retrait de l’ensemble des barrières en béton et leur remplacement par des barrières en bois;
- L’installation d’une fosse septique pour la collecte des eaux usées issues des laboratoires scientifiques et du nouveau sanitaire.
Ce chantier, réalisé en co-pilotage par la direction de l’environnement et la direction des services techniques, a mobilisé 29 ouvriers répartis sur 3 missions différentes pour un total de 3 797 heures de travaux. La supervision des chef(fe)s de districts et chefs Infra successifs, ainsi que l’accompagnement des agents de la direction de l’environnement et des scientifiques ont également été déterminants pour la réussite de ce projet. Une belle démonstration que la préservation de la biodiversité et des paysages, et plus globalement que la gestion de la réserve naturelle nationale des Terres australes françaises est l’affaire de tous !
